dimanche 12 février 2012

Retour sur terre et l'occasion manquée

Après l'immense enthousiasme justement soulevé par le meeting réussi du Bourget et son excellent discours de 1h30, le calme de la raison revenu avec l'énoncé du programme du Candidat François Hollande, sa lecture et sa relecture étant effectuées, il reste dans mon esprit deux réserves dont je n'ai pu encore me libérer.
La première réserve concerne le désendettement de la France que ce programme reconnaît comme un impératif inconditionnel. Par une comparaison hardie et fausse avec la dette d'un ménage, les media et les économistes attitrés des écrans TV, ont inculqué au peuple la pensée unique que ce peuple devait lui-même accepter tous les plans de rigueur, les diminutions de salaires, de retraites, de prestations sociales, en punition logique des excès dont se sont rendus coupables les financiers spéculateurs et les PDG, goinfres insatiables, repus à satiété de bonus, stock-options, retraites dorées et chapeaux, laissés à disposition de cette aristocratie couverte de privilèges d'un autre temps.
Nous n'avons pas oublié la profession de foi du MEDEF, qui proclamait triomphant, en 2007 :
" Défaire méthodiquement le programme du Conseil National de la Résistance".
La démolition de ce programme avait déjà commencé avant N.Sarkozy, mais celui-ci y a rajouté sa touche personnelle et lourde. Il n'est plus nécessaire de rappeler les méfaits de ses gouvernements qui ont semé en France, durant cinq ans, l'injustice, le chômage, le creusement de la dette, la désorganisation des services de l'Etat, la destruction de l'école, la désindustrialisation du Pays, plongeant dans une angoisse profonde les classes populaires et moyennes.

Devant ces dégâts et contre la pensée unique "du peuple payeur", on aurait aimé voir le programme du Candidat plus directement impliqué dans une nouvelle nuit du 4 Août, et dédouaner le peuple de toute responsabilité dans le creusement de cette dette souveraine, et imposer franchement aux seuls financiers le rachat de la très grande partie de celle-ci, selon le grand principe formulé par N.Sarkozy lui-même, selon lequel, "les casseurs doivent être les payeurs".
Oui, de tous ces dégâts, le programme du Candidat devait clairement et nettement en désigner les responsables ou bénéficiaires, et justement les désigner comme les payeurs, et eux seuls.

Reste également le lourd désaccord, mal dissimulé, entre N. Sarkozy et A. Merkel au sujet du rôle de la BCE, dont le rôle devrait, en bonne logique, être semblable à celui de la Fed Américaine. On aurait souhaité sentir davantage d'audace dans la perspective de la nouvelle rencontre et confrontation Hollande - Merkel, qui s'annonce. Là encore, un impératif : Volonté et courage, en signalant le déséquilibre commercial entre la zone Euro et l'Allemagne, au bénéfice de celle-ci.

Et puis enfin, la dernière réserve soulevée : La pusillanimité de Michel Sapin ou Jérôme Cahusac s'agissant de la future réforme fiscale, et en particulier la réforme de l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP).
Si la fusion de l'IR avec la CSG est la bienvenue avec la révision des tranches et des taux sur les tranches supérieures, on reste sur une déception : Celle de ne pas voir se mettre en place immédiatement et complètement la réforme ingénieuse imaginée par Thomas Piketty dans son livre co-produit " Pour une révolution fiscale".
Cette réforme ainsi appliquée eût donné un retentissement historique à ce nouveau gouvernement de gauche. Je crois qu'il y a là une grande occasion manquée qui eût permis, à chaque Français, une lisibilité nouvelle sur son impôt , mettant également en clarté la juste et progressive répartition de cette contribution citoyenne. Lisibilité dont seuls, aujourd'hui, bénéficient les grandes fortunes, capables "d'optimiser leur impôt" en jouant sur les 5 ou 600 niches fiscales, avec l'appui d'un coûteux expert du code des impôts, et en l'édulcorant, en outre, par des voyages ou transferts discrets vers les paradis fiscaux qui existent toujours.

Ces deux réserves sont très importantes. Leur prise en compte est capitale pour insuffler un caractère décisif au changement promis.
1. La menace d'une rigueur appliquée au peuple, perpétuellement reconduite, payant les libéralités que se sont offertes les financiers, ne sera pas acceptée.
2. Et une nouvelle fiscalité non lisible, mal pesée, sera interprétée comme une éternelle course à l'enrichissement des puissants au détriment des faibles.

Oui, ces deux réserves sont d'une importance essentielle. Elles peuvent mettre en balance le vote d'un nombre d'électeurs précieux, au moment crucial, devant l'urne.
Ne jamais oublier, enfin, que le manque de fermeté et de radicalité du discours de la gauche, a été souvent ressenti comme une faiblesse ou un manque de conviction, entraînant ainsi une frange de l'électorat populaire vers l'abstention, ou le vote pour l'extrême droite.

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